Dans une ruelle sombre de Stockholm,
Où le gris et la pluie aux pavés se mêlaient,
Un long jeune homme aux cheveux couleurs corbeaux,
Manteau gris, chapeau haut-de-forme,
Se laisser traîner dans les flaques d'eau.
Sur l’obscurité de son visage blafard,
Où pouvait voir tous les remous de sa tristesse profonde,
Et alors qu'il vérifiait qu'il était complètement seul,
- A l’abris des oreilles indiscrètes,
D’un soupir profond, il laissa échapper ces mots :
« Mon âme est maudite
Je suis déchu de la Voie lactée,
Rien qu’un spectre émacié qui peuple de son cadavre,
Les tristes rues du Stockholm blême.
Ô mon coeur, ô ma douleur...
Je suffoque sous le poids de mes orageuses années,
Dans mon jeune âge pourtant,
Je semble vieux d’éternités,
Et ma voix en sourd écho se meurt
Dans la nostalgie des flaques d’eau.
Ô mon coeur, ô ma douleur...
Ò mon âme, ô ma torpeur,
Dit-moi, mon Dieu, quel chemin prendre ?
Quel chemin prendre pour se guider,
Sur le sentier des jours joyeux,
Où les oiseaux fredonnent des airs,
Dans les branchages du vent léger ?
Seul sur un banc j’interroge mon âme,
Je plonge dans des abysses de ténèbres,
Mon manteau n’est qu’un malheureux linceul,
Et seul j’erre dans le froid de l’automne qui décline,
En foulant de mes pas inutiles,
Le bruissement des feuilles d’automnes.
Ô corbeau, oiseau des rivages plutonien,
Toi pareil à moi, proscrit et rejeté,
Toi qu’on moque ou qu’on craint,
Toi qu’on dit de sombre augure,
Viens-donc t’approcher de moi,
Te poser sur les dunes de mon épaules
Ou sur le sommet de mon crâne,
Et tient-moi donc compagnie,
Dans cet hiver triste et livide."